Navigation dans les mers les plus hostiles de la planète
Nous laissons derrière nous Ushuaïa sous un ciel bleu d’azur pour évoluer vers la sortie du passage Beagle qui sépare l’Argentine du Chili. Cette ambiance estivale ponctuée par l’apparition de dauphins ne présage en rien ce que nous allons vivre par la suite. 2 jours sans voir la Terre dans un océan qui se déchaine à mesure que l’on progresse. Une expérience unique dans les mers les plus hostiles de la planète.
Notre bateau, l’Ocean Victory, dispose des toutes dernières technologies pour à la fois maximiser son autonomie mais aussi notre confort grâce à son système de stabilisateurs. Pourtant face à cette houle de 6m nos corps sont mis à rude épreuve. La position allongée reste la seule tolérable et on ne peut s’empêcher de penser aux marins qui ont traversé ces mers dans des conditions bien plus rudimentaires, parfois même en solitaire. Dans ce passage Drake, on ne peut être que de passage... La météo nous le rappelle à chaque instant.
Je mesure aussi maintenant la distance
qui me sépare de chez moi. Depuis le départ de Paris, je cumule pratiquement 4
jours de voyage et cela pour atteindre seulement la péninsule la plus au nord
de l’Antarctique. Ce continent est 1,3 fois plus grand que l’Europe... Je commence
aussi à comprendre ce que les marins décrivent quand ils naviguent, ce paradoxe
entre l’immensité de ce qui nous entoure et l’espace si limité dans lequel nous
pouvons vivre à bord. Sur un bateau, il n’y a pas d’échappatoire, on se cogne
vite contre soi-même.
Ces deux jours de navigation seront aussi l’occasion de se préparer aux expéditions à venir. On nous affecte nos gilets de sauvetage, nos vestes et nos bottes étanches. Car, pour atteindre la terre ferme, notre seul moyen de transport sera le zodiac.
L’équipage nous demande de débarrasser nos équipements de la moindre peluche, graine ou impureté pour ne laisser aucune trace en Antarctique. L’introduction d’une bactérie ou même d’une graine provenant d’une plante du continent pourrait avoir un effet tragique sur un écosystème aussi fragile. D’ailleurs ici rien n’est biodégradable puisqu’il ne dégèle pratiquement jamais. Les seules traces que nous laisseront devront être celles de nos pas. Et nous ne ramèneront de ces terres que souvenirs et photos.
Les conférences des biologistes à bord nous apprennent qu’il y a ici une quantité assez impressionnante d’espèces: des baleines, des orques, des phoques, des pingouins et bon nombre d’oiseaux. Toute cette biodiversité repose sur un élément clef à la base de toute la chaine alimentaire : une petite crevette, le krill, qui se déplace en banc. Et si les baleines ont longtemps été chassées en Antarctique, elles sont désormais essentiellement protégées par le fait que la pêche dans cette région reculée du monde n’est pas rentable, les distances à parcourir trop longues, donc trop couteuses…
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